En hommage à Louis Malet

Parmi les plus mauvaises nouvelles de cet automne 2020, il y a celle de la disparition de Louis Malet.

Né le 1er février 1926 à Albi, il a vécu 94 ans. Paléographe, occitaniste, il mena aussi de main de maître des recherches archéologiques à plusieurs niveaux avec une prédilection pour la partie la plus chère à son cœur : le Ségala.


 Ces chères Statues-menhirs

Rien de ce qui touchait aux statues-menhirs ne lui était indifférent, surtout quand les spécimens en question avaient pour origines les Monts d’Alban et, au-delà, l’Aveyron. Dés 1983, il publie avec Jean Lautier un compte rendu circonstancié sur celle du “Puech du Lac”. 

En outre, il présente des monuments in situ avec la création du petit musée de Miolles à l’occasion de la découverte des deux mégalithes du hameau de Terral, en 1993.

Décryptage des souterrains

Au-delà des mégalithes, ses centres d’intérêt étaient multiples. Mais c’est le Moyen Âge qui avait sa faveur. Ainsi Louis apporta une contribution à l’étude des souterrains en portant le regard sur ceux du Bas Ségala. Dans les années quatre-vingt-dix, dans la Revue du Tarn, il en répertoria une trentaine. À la recherche d’un archétype, il s’attacha aussi à définir pour chacun des spécificités. 

Avec lui, peu à peu, les souterrains quittaient le statut de monuments mystérieux, prétextes à tous les délires pour devenir des sujets d’étude à part entière. Il parla de souterrains aménagés plutôt que de souterrains-refuges. Il souligna l’intérêt de ces monuments singuliers et typiques de notre région pour parler d’un Moyen Âge prospère où certains paysans entassaient la nourriture dans des sous-sols qui n’avaient rien de forcément isolés. Avec d’autres, il souligna le lien étroit et fréquent entre silos et souterrains.

Un champ d’étude pionnier: les castelas 

Dernière contribution à l’archéologie – et pas des moindres – est son inventaire des « castelas », terme qu’il contribua à faire connaître d’ailleurs. Il acheva de manière magistrale cette dernière étude avec un article dans Archéologie Tarnaise. Celui-ci constitue une référence en la matière. Son insatiable curiosité l’amena à vérifier sur le terrain les données archivistiques qu’il avait patiemment accumulées des années durant. Ainsi, sortirent de l’ombre, des sites quasi inédits et, avec eux, une part très mal connue de l’histoire albigeoise. Celle des débuts du Moyen Âge avant la réforme grégorienne où se révèle tout un réseau de châteaux sous la forme la plus rudimentaire qui soit : une tour et un fossé. 

Intarissable sur la question, l’écouter était un vrai régal. Son propos sur le terrain mêlait des questionnements toujours originaux à un humour décapant quand il s’agissait de donner des réponses définitives sur des périodes sans trace écrite. La question de la place des chevaux dans les castelas me reste en tête pour le site de “Castelpanis” qu’il affectionnait particulièrement. Il avait une façon unique de prendre des problématiques originales à bras le corps et de vous les exposer. À l’écrit, il était beaucoup plus prudent.

Pas de doute, avec Louis, c’est un grand nom de l’archéologie régionale qui nous quitte. Au-delà de son goût pour l’archive écrite sous des formes variées, il ajoutait sa passion pour le terrain afin de recouper les données. En ce sens, sa démarche était moderne. Elle inaugurait ce qu’est l’archéologie d’aujourd’hui, bien au-delà de la passion des objets tape à l’œil, une archéologie où la fouille ne tient que la part mineure, une archéologie construite à la fois sur l’observation du terrain et l’exploration d’archives. Combien de fois m’a-t-il dit : « un bon historien, ce sont les deux. » ?

Humour caustique

À ce titre, il me restera toujours ces paroles rugueuses contre l’abbé Ernest Négre – notre sommité en matière d’onomastique – qui affirmait la présence de sites gallo-romains à chaque suffix ac :

« On voit bien qu’il n’a jamais mis les pieds sur le terrain … »

Avec lui, rien ne devait s’installer, tout devait se construire ou se reconstruire patiemment.

À la différence de nombre de ses contemporains, il était venu à l’archéologie, non par la spéléologie mais bel et bien suite à la fréquentation des archives et il eut à cœur de bien décrocher les deux activités. Le vénérable Archéo Spéléo Club Albigeois, né en 1946, se scinda. Ce fut la naissance du CAPA en 2005 pour lequel il trouva l’acronyme : Centre Archéologique des Pays Albigeois.

Dernière chose, qui m’est très personnelle, Louis Malet maniait une expression française d’une rare  limpidité. Il rechignait à tous les jargons qui sont coutumes pour valider un savoir. Le souci de se faire comprendre de tous l’emportait sur l’entre-soi et les considérations de reconnaissance qui minent souvent l’écriture scientifique. Aussi, le lire sera toujours un véritable plaisir. Je vous y encourage vivement et c’est bien le plus grand honneur qu’on puisse lui rendre.

Bibliographie archéologique


082 – Dossiers de prospections et d’archives des cantons de Gaillac et Réalmont, manuscrits et photos, Albi, s. d., 2 dossiers
083 – Mottes, roques et castelas, s. d., s. l., 132 pages
128 – Résultats du sondage n° 108/02 au Séquestre (Tarn), rapport de fouille, 2002, 7 p.
131 – Châteaux perdus, châteaux oubliés. À la recherche d’habitats fortifiés médiévaux, manuscrit, Albi, 1989, 20 pages
133 – La fouille autour du souterrain de Mouysset (Villeneuve-sur-Vère, Tarn), rapport de fouille, 1992, non paginé
135 – Sites fortifiés de l’An Mil, s. d., s. l., dactylographié, 9 pages
137 – Remarques sur le compoix de Paulin, s. d., s. l., tiré à part, 9 pages
227 – Archéologie en Monts d’Alban, à la recherche des vestiges d’un lointain passé, CAPA, Lombers, 2014, 44 pages
P006 n° 5, 1990 – « Travaux de sauvetage urgent au souterrain de “Plégades”, commune de Terre-Clapier », Archéologie tarnaise, Castres, p. 51-60
P006 n° 5, 1990 – « Complément à l’inventaire des souterrains aménagés du Tarn », Archéologie tarnaise, Castres, n° 5, 1990, p. 91-106
P006 n° 6, 1991 – « Toponymie et prospection archéologique », Archéologie tarnaise, Castres, n° 6, 1991, p. 11-14
P006 n° 7, 1994 – « D’anciens trous de poteaux dans le lit du Tarn, région de Villeneuve/Trébas » et « La fouille autour du souterrain de Mouysset (1992), commune de Villeneuve-sur-Vère », Archéologie tarnaise, Castres, n° 7, 1994, p. 35-46 et 47-64
P006 n° 8/9, 1997 – « Quelques simples remarques autour des statues-menhirs du groupe rouergat », Archéologie tarnaise, Castres, n° 8/9, 1997, p. 7-23
P019 n° 176, 1999 – « Menhirs, rocs à cupules et autres vestiges sur “La Serre du Truel”, commune de Curvalle », Revue du Tarn, Albi, n° 176, p. 633-641
P006 n° 13, 2006 – « Mottes, roques et castelas. Recherches des sites fortifiés de l’an Mil dans le Nord et l’Est du Tarn et la frange aveyronnaise », Archéologie tarnaise, Castres, n° 13, 2006, p. 31-126
P019 n° 137 à 140, 1990 – « Souterrains aménagés du Bas-Ségala », Revue du Tarn, Albi, n° 137 à 140, p. 27-50, 331-351, 447-470, 647-675 (+ tirés à part)
P019 n° 138, 1990 – « Souterrains aménagés du Bas-Ségala (2e épisode) », Revue du Tarn, Albi, n° 138, 1990, p. 331-351
P019 n° 139, 1990 – « Souterrains aménagés du Bas-Ségala (3e épisode) », Revue du Tarn, Albi, n° 139, 1990, p. 447-470
P019 n° 140, 1990 – « Les souterrains aménagés du Bas-Ségala (4e épisode). Essai de synthèse », Revue du Tarn, Albi, n° 140, 1990, p. 647-680
P019 n° 223, 2011 – « Coup d’œil sur l’archéologie des cantons de Valderiès et de Valence », Revue du Tarn, Albi, n° 223, 2011, p. 413-432
P019 n° 236, 2014 – « Églises et sculpteurs sur bois du XIXe siècle », Revue du Tarn, Albi, n° 236, 2014, p. 551-556
P021 XL, 1986 – « Les carrières souterraines de Carlus et d’Amarens », SSABLT, Albi, XL, 1986, p. 363-380
P021 XLI, 1987 – « Les souterrains du Bas-Ségala » et « Le Ségala tarnais devant l’impôt au XVIIIe siècle »,  SSABLT, Albi, XLI, 1987, p. 473-493 et 495-516
P021 XLII, 1988 – « Ouvrages souterrains anciens de la région de Réalmont », SSABLT, Albi, XLII, 1988, p. 665-694
P021 LIII, 1999 – « Petite histoire de la recherche et de l’étude des souterrains aménagés dans le département du Tarn » et « Jean-Pierre Vergnes d’Ambialet, gendarme de Louis-Napoléon », SSABLT, Albi, LIII, 1999, p. 565-582 et 825-842
P021 LVI, 2002 – « Franchises et libertés du Sénégadès », SSABLT, Albi, 2002, p. 29-48
P021 LVIII, 2004 – « Livre des droits et fondations du couvent des frères mineurs de Lautrec » et « Quinze ans de recherche des points fortifiés du premier Moyen Âge : les castelas », SSABLT, Albi, LVIII, 2004, p. 53-72 et 119-140
P021 LIX, 2005 – « Un peu d’onomastique toponymie : les noms de lieux terminés par le suffixe AC » et « Les anciens sites fortifiés du Viaur », SSABLT, Albi, LIX, 2005, p. 99-107 et 183-214
P021 LXII, 2008 – « Remplaçants militaires gérés à Miolles et autres glanures », « Remarques et comparaisons sur les compoix d’Alban et de Saint-André » et « Les très vieux forts ou “castelas” des monts d’Alban », SSABLT, Albi, LXII, 2008, p. 15-26, 163-183 et 185-223

MALET Louis & ASTIÉ Louis Paul
P006 n° 7, 1994 – « La statue-menhir du “Terral”, commune de Miolles », Archéologie tarnaise, Castres, n° 7, 1994, p. 7-12
P019 n° 155, 1994 – « Les statues-menhirs de Miolles (Terral I et Terral II) »,  Revue du Tarn, Albi, n° 155, 1994, p. 423-431

MALET Louis et al.
P019 n° 145, 1992 – « Châteaux perdus, châteaux oubliés. À la recherche d’habitats fortifiés médiévaux », Revue du Tarn, Albi, n° 145, 1992, p. 71-95

PRAT Henri & MALET Louis
P006 n° 3, 1986 – « Deux souterrains aménagés méconnus de l’Albigeois », Archéologie tarnaise, n° 3, 1986, p. 97-103
P006 n° 7, 1994 – « Étude de la céramique trouvée lors de la fouille autour du souterrain de Mouysset », Archéologie tarnaise, Castres, n° 7, 1994, p. 65-69

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