Cette sortie du CAPA, parfaitement organisée par Bernard Alet, sans une goutte de pluie (!) et des températures automnales a réuni quinze participants motivés.


A la découverte de Labastide l’Evêque

Cette bourgade est la « sœur jumelle » en réduction de la proche Villefranche de Rouergue qu’elle n’a pu égaler dans son développement compte tenu d’une situation géographique moins favorable aux échanges commerciaux.

D’après Christophe Evrard, Cette bastide épiscopale est fondée en 1280 par l’évêque de Rodez Raymond de Calmont, au centre de trois paroisses anciennes (Cabanes, Teulières, Cadour). Cette fondation est destinée à regrouper les habitants des campagnes, à exploiter les ressources naturelles et en particulier des mines de plomb argentifère (déjà exploitées par les romains, Tibère 14-37 après J.C.), au profit de l’évêque. La bastide adopte un plan classique où les trois rues charretières principales sont recoupées à angle droit par des ruelles, l’ensemble s’organise autour d’une place centrale dépourvue de couverts où l’église occupe une position bien en vue, signature de son fondateur. Sur cette place se trouvait aussi la maison de l’évêque et celle des consuls. On attribue aux habitants un lot à bâtir de 8m sur 20m environ et une pièce de terre contre un cens (impôt) annuel de quatre deniers de Rodez. Un bayle qui représente les intérêts de l’évêque et les droits des habitants arbitre les litiges et rend la justice. Des consuls désignés assistent le bayle, ils sont responsables de la voirie, des marchés et des foires, chargés de collecter les taxes et impôts.

A l’énoncé de ces dispositions on constate que l’évêque n’a rien laissé au hasard s’agissant de ses intérêts, on peut supposer que les finances ainsi produites aient alimenté le pharaonique chantier de la cathédrale de Rodez.

En parcourant les rues on remarque le beau granite rose employé pour l’encadrement des portes et fenêtres, les toitures à forte pente couvertes d’ardoise posée en écailles de poisson.

Une habitante avertie de l’histoire de ces lieux a fort aimablement guidé le groupe pour la découverte de l’intérieur de l’église gothique dont les arêtes de voûtes sont en granite rose, et du petit musée qui retrace l’exploitation des mines d’argent au fil du temps. Plusieurs maisons présentent des indications sur les activités de commerce et d’artisanat d’antan. A la fin de cette visite (accompagnée par les parapluies !) nous avons apprécié le réconfort d’un savoureux repas chaud servi au restaurant Souyri, l’occasion aussi d’échanger dans la bonne humeur.

Les martinets du Lezert

Un court trajet en voiture nous a ensuite conduits au moulin à martinet de la Ramonde.

C’est un formidable et considérable travail de reconstitution qui a été réalisé par une association avec l’aide de nombreux donateurs. Le bâtiment d’accueil et le moulin ont été entièrement reconstruits partant des vestiges de murailles restantes. Pour parvenir à ce résultat, un groupe de retraités a réalisé, en respectant les façons et matériaux d’autrefois, la maçonnerie, charpente, couverture, la fabrication des roues, du martinet, des soufflets, du foyer, sans oublier la remise en état des ouvrages hydrauliques : barrage de prise d’eau, mur de soutènement de la digue de la paysseiro (le réservoir d’eau), vannes. La reconstitution des mécanismes a demandé un travail d’enquête avec l’aide d’un « martinaire » de Durfort relevant de la recherche en archéologie molinière afin de réunir les connaissances techniques authentiques.

L’ensemble est au bord du Lézert, affluent de l’Aveyron. On y compte treize moulins répartis sur cinq kilomètres, la plupart équipés de martinets pour le martelage du cuivre installés dès le XIVème siècle, réalisant la première étape de transformation du métal pour la fabrication de chaudrons. Les étapes suivantes (mise en forme complète, décoration, ajout d’anses ou de poignées) étaient réalisées par les chaudronniers de Villefranche de Rouergue.

Lors de la visite, une guide assistée de vidéos bien documentées nous a présenté les étapes de cette extraordinaire restauration. La visite du moulin animée par deux membres de l’association et l’abondance d’eau courant dans le ruisseau nous a permis d’assister à une démonstration de fonctionnement du martinet.

Le marteau en fer de 110 kg est emmanché sur une poutre portée par un solide support en bois et animée d’un mouvement de balancier au moyen d’un arbre à cames constitué d’une bille en chêne de six mètres de longueur environ et 0,6 m de diamètre qui traverse le mur du bâtiment, tournant en prise directe avec l’axe d’une roue verticale à palettes en bois d’environ 1m50 de diamètre, mise en mouvement par un jet d’eau sous pression d’une chute d’environ quatre mètres, amené par une conduite forcée tubulaire métallique sur les palettes situées sous la roue. Il est probable qu’à l’origine cette conduite a été réalisée avec quatre planches assemblées en carré, formant un coursier, mais moins durable. Immergée près de la surface de la « paysseiro », une vanne à guillotine permet d’ouvrir ou fermer l’arrivée d’eau sur la roue. L’opérateur peut commander cette vanne au moyen d’un levier placé à l’intérieur à côté du martinet, relié à la vanne par un astucieux système de barres et tiges de renvoi.

Une autre roue verticale à palettes d’environ 1m de diamètre assure le mouvement de deux grands soufflets pour attiser le foyer de chauffe du cuivre avant martelage. Un levier de commande avec barres de transmission analogue au précédant permet de commander l’ouverture et la fermeture de la vanne qui alimente en eau une deuxième conduite forcée. Le mécanisme de transmission du mouvement à partir de l’axe de la roue inclut une bielle-manivelle, des barres-leviers, une chaîne et un cordage. L’air des soufflets est dirigé jusqu’au foyer par une conduite en fer. Le fonctionnement des soufflets, alterné, permet d’obtenir une soufflerie continue. Le foyer était alimenté en charbon de bois fabriqué par les charbonniers de la région.

Sous le marteau du martinet, servant d’enclume, un bloc de granite d’environ un mètre cube soit environ deux tonnes est enterré, la face supérieure au niveau du sol.

En maîtrisant la force de l’eau et quelques principes mécaniques, cette technologie rustique mais efficace a permis de construire les premières usines et de fournir à l’échelle du Lézert, un véritable site industriel historique porteur de richesse.

Le pont du Cayla

Ce pont remarquable très étroit et en dos d’âne enjambe fièrement la rivière Aveyron sur le trajet de l’ancienne voir romaine qui reliait Segodunum (Rodez) à Divona (Cahors) sur laquelle étaient convoyés du bétail, des marchandises et des lingots d’argent.

Le présent ouvrage date du Moyen-âge était assorti d’un péage. En creusant son lit en un méandre presque jointif, l’Aveyron n’a laissé qu’un étroit passage où se trouve un ancien castel qui domine le pont. La rivière nous a montré un débit élevé pour la saison plus en rapport avec des eaux vives de printemps.

C’est sur ce pont magnifique dans un écrin de verdure et avec le bruissement des rapides que nous avons posé pour ces sympathiques photos de groupe.

Conclusion

Cette belle journée nous a permis de partager ces hauts-lieux de l’histoire remarquablement préservés et ouverts aux passionnés du patrimoine historique bâti et industriel.

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