Géographie, géologie

La commune du Verdier est située sur la moyenne vallée de la Vère à mi-parcours entre sa source à Taïs près de Blaye-les-Mines et Bruniquel où elle se jette dans l’Aveyron. Ce territoire se trouve dans la partie occidentale du plateau Cordais, formé de dépôts calcaires lacustres voici 35 millions d’années au Stampien. La Vère a creusé un fossé naturel assez ample dans sa partie Sud. Dans la partie Nord, le plateau a été découpé en plusieurs lignes de crêtes alternées de vallons creusés du Nord vers le Sud par trois affluents de la Vère : à l’Est du village se trouve l’affluent le plus long de la Vère, d’une dizaine de kilomètres, son bassin versant est presque dix fois moindre en superficie (36 km2 contre 311 km2), c’est Vers-Vère. En période de crues d’hiver et de printemps il se charge de galets, graviers et d’alluvions rouges venues de Grésigne et du dôme de Vaour. C’est ainsi que sur la commune du Verdier, la vallée de la Vère est recouverte de terres rouges appelées rougères, sur une épaisseur qui atteint quelques mètres. Sur les hauteurs du plateau, la découpe par les cours d’eau de la dalle calcaire qui atteint plusieurs mètres d’épaisseur et recouvre une nappe phréatique, a dégagé l’ouverture de sources pérennes dans toute la bordure du plateau, repérées et utilisées comme points d’eau potable dès la Préhistoire, les sources les plus abondantes ayant favorisé l’installation sédentaire de nos ancêtres et aux époques historiques à l’établissement d’une dizaine de fontaines et lavoirs et au creusement de puits.
La constitution géologique du calcaire lacustre s’est révélée favorable à la formation, particulièrement sur les communes du Verdier et d’Alos, de bancs assez considérables de silex.

L’empreinte des hommes sur leur territoire

a) – Durant la Préhistoire

C’est à Marcel Delpech vigneron au Verdier que l’on doit la révélation de la présence par milliers, sur le territoire de la commune, de silex taillés par les hommes préhistoriques. La publication en 1956 dans la revue du Tarn, « Le site Préhistorique du Verdier », fera date pour les préhistoriens. Dans les trois décennies suivantes, les objets récoltés représentent la plupart des temps préhistoriques. Ce sont des chasseurs-cueilleurs Néandertaliens qui ont les premiers découvert et exploité le silex. Au Paléolithique Ancien les tailleurs de silex produisent les bifaces Acheuléens d’assez grande taille autour d’une quinzaine de centimètres de longueur. Parfaitement symétriques pour certains, ils sont obtenus par dégrossissage puis taille affinée à partir d’un seul bloc de silex appelé nucléus. Au Paléolithique Moyen, Néandertal taille des bifaces plus petits, de facture plus soignée, en forme d’amande ou de cœur, le Moustérien de tradition Acheuléenne. On a retrouvé plusieurs de ces « coups de poings » à bonne distance du Verdier d’où ils ont été exportés. On trouve aussi des bifaces sur éclat apportant un avantage technologique (quantité de matériau nécessaire) et temps de fabrication raccourci. Les bifaces sont utilisés comme couteau à usages multiples, les pointes pour armer des lances utilisées pour chasser les proies en attaque rapprochée. Au Paléolithique supérieur vers 45000 BP de nouveaux humains modernes parfois métissés de Néandertal exploitent le silex avec de nouvelles techniques : le nucléus préparé au préalable, donne nombreuses lames et lamelles, multipliant la longueur tranchante obtenue d’un facteur cinq à dix environ. Les outils produits sont des lames, couteaux utilisables directement, des armatures de sagaies, et plus tard, par d’autres populations humaines venues de l’Est de l’Europe, des outils de fabrication d’armes en os et bois de cervidés : burins permettant de dégager des pointes de sagaies, des aiguilles à coudre, des harpons de pêche, grattoirs de finition, des outils pour la préparation et l’assemblage (couture par aiguilles à chas) des peaux destinées à l’habillement : racloirs, perçoirs. Si l’on a retrouvé nombre de ces outils sur la commune du Verdier d’où ils proviennent, des milliers ont été découverts dans les grottes de la basse vallée de la Vère et surtout de l’Aveyron entre Saint-Antonin et Bruniquel.

b) – Aux époques historiques

Habitat : le village regroupe la moitié de la population, l’autre moitié bâtie existante est répartie sur huit hameaux, une vingtaine de fermes historiques et cinq moulins à eau dont trois sur la Vère, deux sur la Vers-Vère. Le recensement de 1792 montre une variété de métiers permettant à la communauté du Verdier dans son ensemble de vivre en quasi-autarcie, avec peu de confort et de rudes conditions de travail pour la grande majorité, la domination de l’église institutionnelle encadrant de près la vie sociale des habitants, avec une forte solidarité forcée par les conditions de production et de fabrication.

Ressources naturelles : la population pratiquait la chasse, la pêche et la cueillette (champignons, responchons, pissenlits, fruits sauvages…). D’après le cahier de doléances du Verdier, article 5, les habitants du Verdier avaient le droit de récolter le bois mort et le mort bois pour le chauffage, en Grésigne, par lettres patentes du roi Charles en 1325, confirmées en 1496 puis Henri II en 1551 et François II en 1559, et jusqu’à Louis XVI. Le silex était exploité pour fabriquer les meules de moulins et le calcaire extrait et taillé pour la construction. De gros blocs bruts étaient aussi utilisés à la Préhistoire pour les mégalithes et à partir du Moyen-âge pour bâtir les seuils, barrages construits sur les rivières afin de diriger une partie de l’eau vers les biefs, réservoirs surélevés indispensables à capter la force de l’eau dans les moulins.

Agriculture : jusqu’aux années 1970, la polyculture vivrière s’impose dans un mode de vie quasi- autarcique : chanvre, prairies et jardins au fond des vallées autrefois densément bocagées, vignes et arbres fruitiers en côteaux, bois dans les zones plus escarpées, céréales et vignes sur les plateaux, sans oublier les espaces réservés autrefois au pastoralisme, les marécages en fond de vallée.

En 1789, le premier article du cahier de doléances du Verdier réclame que « la Vère et les ruisseaux torrents qui s’y jettent soient recreusés, élargis et alignés de moulin à moulin sans porter préjudice à ces derniers vu leur grande nécessité. Le débordement de ces ruisseaux détruit nos récoltes, laisse des graves à la place des bonnes terres, et ensable nos prairies source d’épizooties ».

En 1819 une étude technique est lancée pour remédier aux crues des cours d’eau dans la vallée de la Vère, de Cestayrols à Puycelsi, avec un projet de redressement de la rivière dont le cours très sinueux présente de nombreux méandres.

En 1972 commence le chantier de remembrement des terres agricoles de la vallée de la Vère. Il s’agit d’une réforme agraire, transformation majeure du territoire qui vise, comme partout en France, partant d’exploitations morcelées et dispersées par l’histoire, à rationnaliser l’agriculture en regroupant les terres de chaque domaine et en agrandissant les surfaces. En 1975 les bulldozers et pelles mécaniques, après avoir rasé toute la vallée à partir de Villeneuve sur Vère, arrivent au Verdier et poursuivent leur dévastation jusqu’à la commune de Puycelsi . Le paysage bocager constitué de grands arbres (peupliers, saules, frênes, enterrés…) est remplacé par de grandes surfaces prêtes pour l’agriculture mécanisée. La Vère est recreusée en un canal de gabarit anti-char qui réduit sa longueur d’un tiers, en supprimant tous les méandres, détours et zones humides. Les prises d’eaux, canaux et réservoirs des moulins sont pour la plupart anéantis, les privant de la force hydraulique motrice. Au plan humain, les anciens de l’époque ont été durement frappés par la disparition du paysages qu’ils avaient toujours connu, hérité des générations précédentes, et exploité avec retenue pour les transmettre toujours utilisables. Un point positif tout de même, puisque pour les exploitants cet aménagement a été un grand progrès pour faciliter les travaux agricoles.

Visite du village et des abords

1- Le pigeonnier sur pilotis de la Bouriette : histoire d’un pigeonnier voyageur

Dans le cadastre du Verdier de 1644 est mentionné, dans une chènevière au bord de Vers-Vère à proximité du moulin de la Viale, un pigeonnier à quatre pieds. Sur le cadastre Napoléon de 1811 il est situé à environ 150 mètres dans l’actuel jardin de buis de la maison Maignial. Sur un dessin de 1830 signé de Sylvain Maignial de l’Espaliou, il est représenté au même emplacement. Probablement démonté et reconstruit vers 1850, il a été installé une centaine de mètres plus loin dans sa position actuelle, à côté de la ferme historique de la Bouriette. Les piliers sont en grès de Grésigne et surmontés de capels, autrefois doublés d’une collerette de tôle barrant le passage aux rats et aux fouines pour protéger les œufs et les pigeonneaux. La quille sommitale est datée de 1771. Il y a deux lucarnes percées de trous pour la circulation des pigeons. La colombine (fiente des pigeons) était utilisée comme engrais exclusif dans les vignes.

Derrière le pigeonnier on devine la ferme historique de la Bouriette avec maison d’habitation, ancien garde-pile ou grenier : une tour pour le stockage du grain, seule monnaie de paiement sous l’ancien régime, à l’abri des intempéries, des rongeurs et des voleurs, étable et grange à foin, cages à lapins, poulailler, étables à cochons, ancien four à pain, aire à battre, etc…

2 – Le faubourg bas

Lirissou, l’atelier des charrons, le bolet, une façade-pigeonnier

3 – L’église gothique

L’église a été construite en 1591. Jusqu’à cette date, il n’y avait pas d’église dans le village : plusieurs communautés : Rouyre et La Mothe, Sainte Cécile, Le Verdier, étaient desservies par une église commune au lieu-dit Saint Paul de Feugières à 1 km environ à l’ouest du Verdier. Cette église romane en ruine a été vendue aux enchères comme bien national à la révolution de 1789, Le cimetière qui bordait l’église vers l’ Ouest et le Nord, et a été utilisé jusqu’ en 1789 selon les registres paroissiaux. Au village, l’église a été construite dans les anciens fossés de fortification du château féodal.

Le clocher placé à l’extrémité Ouest de la nef était à l’origine un clocher-mur, remplacé par un clocher- tour carré beaucoup plus imposant en 1872, surmonté d’une flèche pyramidale en brique. Foudroyée, cette flèche a été abattue en 1927 et remplacée par un étage à arcades encore visible actuellement. Plusieurs cloches rapatriées de Djijelli en Algérie par le curé Delmas ont été ajoutées dans les années 1970 et l’ensemble constitue une gamme diatonique complète permettant de réaliser carillons, angelus, glas et de sonner les heures avec une horlogerie automatique.

L’église est de style gothique classique, avec une nef unique flanquée de quatre chapelles latérales jouant le rôle structurel de contreforts, bâtie de beau calcaire lacustre blanc provenant de carrières en bordure du plateau de Pierre-Levée. La voûte de la nef, élégante, procure une bonne acoustique.
Au sol , sous le pavage apparent se trouvent de nombreuses pierres tombales, attestées par les décès répertoriés dans les registres paroissiaux et les testaments indiquant les inhumations dans l’église. Au chœur se trouvent ainsi les sépultures des seigneurs de Cahuzac, dans la chapelle de gauche celles des De Gout, dans la chapelle de droite, De Guérin puis Maignial.

Le rétable en bois doré proviendrait du couvent des Capucins de Gaillac, ainsi sauvé de la destruction à la révolution. A gauche et à droite sont perchées les statues de Saint Pierre tenant la clef du paradis et Saint Paul tenant une épée rappelant à la fois qu’il fut centurion et qu’il fut décapité. Au « ciel », le père céleste tient, une originalité semble-t-il, le globe surmonté de la croix. A gauche et à droite en hauteur, on peut admirer les vives couleurs des vitraux représentant Saint Pierre et Saint Paul. Au fond de l’église dans une tourelle flanquant le clocher-tour, se trouve un beau baptistère (cuve en grès ronde multilobée extérieurement, voir photo) et les fresques colorées réalisées par Nicolai Greschny représentant les miracles rapportés de la vie de Jésus.

L’autre tourelle abrite un escalier à vis permettant l’accès à la tribune du clocher-tour d’où l’on sonnait les cloches manuellement autrefois, angélus matin, midi et soir.

4 – L’enceinte médiévale, les fossés

Repérage

5 – Le faubourg haut

Maison à colombages datée du XVIIème siècle (1690) et ancienne auberge du faubourg haut : inscription de linteau de porte « il y faut beaucoup de biens pour faire grande chère sans faire rien » Plus haut, l’inscription « Boun temps » serait une locution Occitane souhaitant la bienvenue. Une zone martelée laisse supposer qu’un blason y a été détruit.

6 – Le village médiéval

Le logis des De Cahuzac, la mairie, l’ancienne tour de guet, le château XVIIème-XVIIIème, les fossés, les portes fortifiées.
Au Verdier, la découpe du plateau calcaire Cordais par les cours d’eau : Vère, Vers-Vère et Escourrou, a formé un promontoire pointu bordé de pentes escarpées favorable à l’établissement d’un éperon barré défensif probablement dès l’Antiquité. Les romains ont laissé quelques traces de leur présence en quelques points de la commune. Au Moyen-âge, Le Verdier, dépendant auparavant de Cahuzac sur Vère, s’érige en communauté autonome avec quatre consuls par des actes de 1327 (baillie) et 1359 (consulat). Les habitants fortifient leur enceinte par un bâti à solins, construisant leurs maisons en continuité mitoyenne pour former à minima de travaux et de matériaux, une ceinture défensive doublée d’un fossé. L’enceinte s’ouvre par deux portes au Nord et au Sud, celle du Nord est renforcée par une tour de guet et un probable pont-levis, celle du Sud par une herse.

7 – Le château XVII-XVIIIème siècle

La famille noble De Cahuzac était établie depuis 1250 dans un logis dominant le cimetière du Verdier, dans la partie fortifiée du village. Au XVIIème siècle il semble qu’elle se soit suffisamment enrichie pour faire construire un château d’apparat. Si l’emplacement de ce château est connu en bordure Est de la ville forte, une grande partie du bâti a été détruit à la révolution Française. Le bâtiment, divisé en quatre lots partageant la longueur en tranches, fut vendu aux enchères à la bougie comme bien national. Jean Farjanel de Lescure, commune de Vieux, en a acquis trois lots. Le bâti correspondant a été démonté et reconstruit principalement à la ferme de Lescure où l’on peut reconnaître les linteaux de fenêtres incurvés et la galerie couverte et bordée d’une superbe balustrade XVIIème siècle en grès. Une autre partie considérable aussi a été rapportée au dernier étage de la maison du Claux (Sud commune du Verdier) avec trois fenêtres à linteau incurvé et dans la même façade orientée au Nord, des pierres de taille régulière, soignée et parfaitement assisées en alignement horizontal.

A La Capusié sur la commune du Verdier, à proximité du Mas d’Amat, on remarque un « ensoleillou » réalisé en sept arcades florentines en pierre calcaire blanche soigneusement taillée avec clefs et d’une petite ouverture ovale taillée dans une seule pierre habituellement placée au-dessus des portes d’entrée pour l’éclairage intérieur. Cet orifice est encadré d’un bas-relief représentant un parchemin déroulé, la date de construction est intercalée entre les découpes du bas de la forme de parchemin : 1646. La provenance de cette belle architecture renaissance manifestement réemployée n’est pas encore élucidée.

8 – La maison de caractère de la famille Maignial XVIIème-XIXème siècle : extérieurs cour et dépendances, maison, terrasse et jardin de buis

La famille est installée dans le village où quinze générations se sont succédées de père en fils depuis 1475 jusqu’à nos jours. Dépendances : ancienne orangerie, ancienne écurie, emplacement du four banal d’ancien régime, puits, estaplous, garage-cave vinicole avec deux cuves à carreaux de verre, en façade Sud-Est dominant un jardin potager : grosses pierres bien équarries qui auraient pu être la base d’une tour de défense. Maison d’habitation : elle résulte de plusieurs achats successifs commencés au XVIIème siècle et qui se sont poursuivis jusqu’au XIXème siècle. Edifiées hors les murs de la ville, trois maisons ont été rassemblées en une seule en englobant deux anciennes rues, en ajoutant une aile pour obtenir la symétrie de la façade, en ajoutant un étage et en alignant les ouvertures, en construisant la terrasse c’est un chantier assez considérable.

9 – Le moulin de la Viale

Ce moulin de style XVème siècle était la propriété de la famille noble de Cahuzac jusqu’à la révolution Française. Construit en contrebas du village sur la Vers-Vère, il était équipé de deux roues occitanes horizontales entraînant chacune une meule. Il en reste une en grès du Trias de Grésigne au pied du bâtiment. Il est mentionné sur le cadastre de 1475 et décrit sur le cadastre de 1644 comme moulin à deux meules à blé. Il a été acheté par Jean Farjanel de Vieux aux enchères de 1792. Les corbeaux à l’angle Sud-Ouest du bâtiment, sous la bordure de la toiture, sont le dernier témoin visible d’une échauguette- pigeonnier disparue et avec, d’un étage supplémentaire probablement démoli à la révolution de 1789. En 1839, La fille de Jean Farjanel échange le moulin contre une dépendance, vigne et pré de la Capusié, avec Jean-Pierre Mainfroi Maignial du Verdier. En 1920, Yves Maignial médecin modernise le moulin en minoterie à cylindres et turbine Poncelet-Francis. Il électrifie le moulin, les rues du village, la maison de famille et la batteuse de la ferme de la Bouriette. L’activité meunière cesse dans les années 1930, puis le moulin reprend du service pour la production de farine pendant la seconde guerre mondiale. Il reste ensuite à l’abandon sauf quelques travaux de maintien des toitures jusqu’en 1997 où la couverture et charpente de la partie ancienne est entièrement refaite. En 2003 a lieu le chantier de réhabilitation et d’agrandissement en habitation de l’ensemble, suivi d’une période de travaux d’aménagement des abords, des installations hydrauliques, des installations de chauffage en énergies renouvelables (turbine fonctionnant avec la force motrice du moulin et génératrice électrique, centrales solaires thermiques, insert de cheminée, isolation thermique) et de travaux d’intérieur s‘étalant sur plus de vingt ans. Des maquettes (Henri Cros) y montrent notamment des mécanismes des moulins à farine et à huile d’antan.

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