Sur la route de Léjos (Lamillarié)
Une enquête de Yann Roques

Les voies anciennes de l’Albigeois qui prennent souvent le nom de voies « romaines » (1) sont assez bien connues par les textes (2). Peu d’entre elles ont fait l’objet d’études vraiment approfondies cependant. Il fut un temps, l’une d’elle, la « camin roumieu » allait vers Béziers par Lautrec et Castres. Elle suivait un temps la vallée du Thoré et générait tout un réseau de voies de desserte.

Morphologie

On le sait, des vestiges de cette voie existèrent jusqu’à la toute fin du XIXe siècle puisque Émile Jolibois en livre une description et une coupe à proximité d’Albi, près du ravin de “Sept Fonds”, à coté de la cité. Il relate alors une chaussée légèrement bombée, large de 5,50 m, composée d’une assise en béton, d’un lit de galets posés à plat et d’un revêtement fait de blocs de grès quadrangulaires de 0,20 à m à 0, 30 m de côté. Elle était couramment appelé “l’estrade ».

Rien ne vaut la visite sur le terrain

Surprise, cette voie très ancienne, prés de Lamillarié, est encore bien visible en rase campagne. Précisément au hameau de Léjos où je me suis rendu. Après l’église Saint-André (3), j’ai décidé de passer par le chemin qui relie Cantegraille au Cayrié, plein Est. Au bord de ce chemin une croix, je me suis alors dit c’est par ici. J’ai longé un champ jusqu’à retrouver la fameuse voie.

Comme le disaient les anciens, elle est bien là sur presque 200 mètres. Ce qui surprend, aux premiers abords, c’est sa largeur. Aucun chemin de terre agricole n’a aujourd’hui cette dimension, plus de 5 mètres d’emprise. Par endroits, notamment dans la petite montée, la voie est empierrée avec le calcaire local.

Aujourd’hui la voie semble s’interrompre aux croisements de plusieurs champs. La lecture du tracé redevient sujette à interprétation.

Relique du passé, quelques mètres plus loin dans la continuité, une petite cabane construite exactement dans la largeur de la voie qui continue sur presque 150 mètres. 

La voie est ensuite peu visible et enfouie sous un tas de feuillages et en herbe. Ils font écran à la poursuite de la lecture du tracé.

Quelques mètres plus loin la voie s’arrête à l’orée d’un champ. Sur sa droite au milieu des arbres deux petites structures, une ronde d’environ 2,50 m de diamètre arrasée et une petite cabane à moitié enfouie dans le sol. Je ne saurai dire ce que c’est. 

Voilà pour mon excursion à la recherche de la voie. Savoir si elle est gallo-romaine ou pas, relève d’un exercice périlleux. Faut-il voir, comme les anciens dans les toponymes des alentours, des signes de romanité ? Léjos = légion ? Lamillarié = le miliaire (borne)

Il serait intéressant, par ailleurs, d’inspecter les lieux pour trouver de la présence gallo-romaine. À ma connaissance, aucun site n’est connu dans le km autour de la voie.

Pas de doute que ce segment de route très ancien et assez rare mérite une attention particulière et, à moyen terme, des mesures de protection.

Notes

(1) – Nous ne rentrons pas dans le débat de savoir si elles sont ou pas, romaines. Il est vraissemblable qu’elles soient d’ailleurs encore plus anciennes à la lueur de quelques lectures stimulantes ci-dessous.

(2) – Jean LAUTIER, Connaissance du Tarn, Tome 2, 1974, p. 14.
Le beau travail aussi mené par Élise BERGÈS sur la voie Béziers-Cahors qui passait à Albi.

(3) – Mention de cette église est faite dans la Carta Prima de 1067. Paroissiale, l’église devait être beaucoup moins isolée qu’aujourd’hui.

Charles POMMEAU, Véronique BONTE, A la découverte des vieux chemins, Petit manuel de viographie, Moulin,1995.

Excellent ouvrage mais difficile à trouver pour mener l’enquête.

Raymond CHEVALIER, Les voies romaines, Picard, Paris, 1997.

Un grand classique en matière de culture savante à propos des voies romaines.

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